CONFÉRENCE III


Correspondances



Lundi 18 décembre 2023 — 14h45 à 16h45
Auditorium du Musée des Beaux-Arts
Rouen


Philosophiques, poétiques, éthiques, sont in fine enjeux du corps en acte le temps d'élévation du spectacle vivant, la représentation, l'image de soi, émanations de l’âme et de l’amour ainsi qu'est dépeinte et s'annonce la passion d'être un autre de manière toute plus symbolique et allégorique les unes que les autres, laquelle en images animées ravit le spectateur qui entre à son tour dans les pas de l'entre-deux comme s’inventent les visages d'un monde ailé imaginaire. Figures de style, les ombres sur le plancher parfois personnifient Psyché et Cupidon sous les traits ou l’enveloppe de jolis papillons et doux chérubins tels qu’en iconographie classique, s’admirent les motifs esthétiques en miroir du corps-esprit/corps en jeu/le corps en scène semble bel et bien être en question tandis que l’expression ne laisse d’être plus interrogative ni énigmatique et mystérieuse comme sous le soleil, l'au-delà des mots et le moment du geste faisant silence.

Au fil de l’histoire de l’art, s’affichent sous des formes fortuites les représentations du corps aux prises aux limites de l’arbitraire et du libre arbitre, la liberté indivise, souveraine, suprême, précipitant en condensé la vérité du sujet dans l’expression scénique par corrélation du sensible et de l’intelligible, la vibration mais le verbe irradiant quelque nécessité intérieure de nature et d'essence atemporelle et archétypale. En surpassant modes et vogues, s’impose la beauté dans l’interprétation contre toute attente échappant aux modèles canoniques conçus effectivement pour être remplacés, c'est attesté par les œuvres elles-mêmes au registre des répertoires. Par corps en représentation interposé (image acoustique-métaphore filée) faute d’enjeu autre, entre la vie et la mort, il n'y a plus rien que l’éternité ou le néant en lice dans la compétition au lever de rideau quand s’opposent les contraires dos-à-dos au temps du spectacle dans ce dialogue alchimique à une voix, de soi à soi-même, depuis les uns et les autres, artistes et publics se faisant face nonobstant toute tentative de faire éclater le système frontal de la représentation scénique théâtrale conventionnelle et traditionnelle pour une autre moins prévisible, en réfutant les objections du spectaculaire et de la montre par spectacularité même, justement. Dès lors : être-paraître/faire-agir, en creux n’être rien d’autre en personne que chose symbolique, langage des mots et des gestes par les ressorts du plus petit mouvement, battements de cœur, pulsation, c’est-à-dire en même temps et le souffle, et la respiration, soit tout un cosmos d’harmonie, l’univers tout entier sans états d’âme autre que les états de corps cristallisés comme au premier regard, instantané saisi en raccourci dans les théâtres, cette boîte noire en véritable camera obscura qui renferme le vif et le grave comme le plus diaphane et léger du spectacle vivant, le subtil théâtre de l’histoire s’anime donc en interaction scène-salle sur les planches et à l’écran tout comme pour vivre sa vie devant l’inconnu, sinon devant Dieu, l’œil en faction se fait le troisième œil qui oblige à revenir sur soi perpétuellement en conscience afin d’entrer en écho-résonance dans les pas cadencés du sublime, témoin/martyr, victime-émissaire par substitution d’envergure et personnages interposés. En prenant le risque du rythme, s’actualise l’irrépressible volonté du sujet-objet que de s’accomplir. Du nom Désir en libération ou réalisation de soi, l’homme à l’image et la ressemblance emprunte de par son jeu les chemins de traverse des aventuriers à force de s’adonner sans avatars aux temps forts de la fête. Et il se jet e en pâture dans l’arène et le vide se fait quelque part dans le noir-plateau. Ainsi il marque de son sceau, en signe qu’il est, le point d’ancrage du commencement, la genèse à la clé de l’impulse-impact, condition sine qua non de tout jeu scénique. Alors se produit l’événement-phénomène de la représentation : exécuter, qui du musicien ; danser, qui du baladin ; jouer, qui du comédien – les interprètes, artistes de scène, en poète se vivent, endossant le rôle, assumant la fonction, le persona satisfaisant aux jeux de masque sans complaisance à soi.

Faux-semblants vs trompe-l’œil, le théâtre à l’italienne-théâtre d’illusion braque ses feux sur un point focal en perspective et vis-à-vis du point de fuite, le cadre de scène circonscrivant le fait pensé, senti, le ressenti exécuté, dansé, joué, musicien, danseur, comédien s’évertuant à donner vie à une vue, une optique, faisant œuvre de l’esprit et non pas acte de présence, tout au contraire. Par conséquent incarnation s’avèrera tout processus de création au théâtre des solitudes.

Dans quelle mesure mettre en scène un spectacle relève-t-il, tout comme en écriture, de correspondances d’ordre synesthésique ? Est-ce jeux de combinatoires, mode compositionnel par association d’idées, schèmes associatifs, transversalités liant les uns aux autre le chorégraphique, le musical, le dramaturgique au lyrique qui élève les esprits haut les cœurs par le corps en acte ?

Regards croisés mais pensées en contre-point pour tout corps à l’épreuve et enjeu, l’âme et l’esprit en jeu au prix d’une réalité : soi, la passion d’être autre chose que peau de chagrin.

(c) Valérie Colette-Folliot, le 11 décembre 2023

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Ailleurs (une sélection d'extraits vidéo) :

1. Farinelli, « Lascia ch’io pianga » (air de Almira), de Haendel (1705)
2. Variation d’Odette (acte 2) Le Lac des cygnes de Tchaïkovski et Petipa-Ivanov (d’après la version de 1895)
3. Variation d’Odile (acte 3) Olga Smirnova - Le Lac des cygnes de Tchaïkovski et Petipa-Ivanov (d’après la version de 1895)
4. Cyrano de Bergerac d’Edmond Rostand (1897) par Coquelin (1900)
5. Fatboy Slim ft Greta Thunberg - Right Here, Right Now (Live at Sidney Myer Music Bowl 2020)


Ailleurs (une sélection d'ouvrages) :

1. Wassily KANDINSKY, Du spirituel dans l'art et dans la peinture en particulier, Collection Folio
essais n° 72, Gallimard, Paris, 1989 (1910).